Appel au renouvellement de l'engagement
Appel au renouvellement de l'engagement à mi-chemin de la Décennie «vaincre la violence», 2001-2010 - Les Eglises en quête de réconciliation et de paix
version pdf (15.8 KB) Ce document a pour but de rendre compte des enseignements, de la dynamique et des résultats de la première partie de la Décennie. Il rappelle aussi que la Décennie est toujours en cours. En septembre 2005, il a été soumis à l'attention du Comité exécutif qui l'a accueilli favorablement, étant entendu qu'il sera porté à la connaissance des délégués dans le contexte de la plénière sur la Décennie « vaincre la violence », en tant qu'appel lancé aux Eglises afin qu'elles renouvellent leur engagement. |
«Rien ne caractérise mieux le chrétien que le fait d'être un artisan de paix» (Saint Basile le Grand)
Voici maintenant cinq ans que le Conseil oecuménique des Eglises a lancé la Décennie «vaincre la violence». L'Assemblée de Porto Alegre coïncide avec le milieu de cette Décennie et offre l'occasion de célébrer ce qui a été réalisé, de partager nos expériences, de procéder à une première évaluation et de redéfinir le chemin à suivre pendant les cinq années à venir.
De l'objectif de vaincre la violence et d'édifier une culture de paix découlent pour nos Eglises des défis spirituels, théologiques et pratiques qui touchent au coeur même de ce que signifie être l'Eglise. Le débat sur l'esprit et la logique de la violence sous tous leurs aspects a débuté, mais la voie que nous avons choisie exige de la persévérance et de l'endurance.
Il est encourageant de constater que l'élan de la Décennie touche un nombre croissant d'Eglises et de régions. Des liens de solidarité oecuménique dans la quête de la réconciliation et de la paix ont été forgés et renforcés; de nouvelles initiatives ont été lancées dans le monde entier, de nouvelles alliances en faveur de l'édification de la paix ont été conclues, une nouvelle réflexion théologique est en cours et un nombre croissant de chrétiens redécouvrent la spiritualité de la non-violence.
Le dialogue interreligieux au sujet des rapports cachés entre la religion et la violence est devenu l'un des éléments centraux de la Décennie. Cela est notamment le cas du dialogue entre chrétiens et musulmans. La confiance édifiée grâce à un patient dialogue et à une collaboration pratique en faveur du bien commun peut empêcher qu'on utilise la religion comme une arme.
Au cours de la première moitié de la Décennie, nous avons été confrontés à de cruelles attaques terroristes qui ont entraîné des guerres en Afghanistan et en Irak. L'esprit, la logique et la pratique de la violence se sont manifestés dans une dimension inattendue. Les énormes efforts en vue de renforcer la sécurité dans le cadre de ce qu'on appelle «la lutte contre le terrorisme» ont abouti à la prolifération des armements et à l'intensification de la militarisation du monde. Alors que nous commençons à discerner plus nettement les exigences éthiques de la responsabilité de protéger ceux qui ne peuvent pas se protéger euxmêmes, nous acquérons la conviction que le terrorisme international ne pourra pas être vaincu par des moyens militaires. En même temps, nous reconnaissons qu'un nombre toujours croissant de personnes sont victimes de la violence dans le cadre de conflits civils et locaux où on recourt aux armes légères. Cela constitue un défi considérable pour l'ensemble des Eglises.
Le souci de la sécurité inspire toujours davantage les décisions, tant individuelles et sociales que politiques. Or la «sécurité humaine» est le fruit de relations équitables au sein de la communauté. Nous reconnaissons que la sécurité est toujours plus menacée par les effets de la mondialisation de l'économie, c'est pourquoi la quête d'«une autre mondialisation au service des êtres humains et de la terre» doit être comprise comme une contribution décisive à la continuation de la Décennie.
Le respect de la dignité humaine, le souci du bien-être du prochain et les efforts en faveur du bien commun sont des impératifs de l'Evangile de Jésus Christ. Les hommes et les femmes sont créés égaux à l'image de Dieu et justifiés par la grâce. C'est pourquoi les droits de la personne humaine sont des facteurs essentiels de prévention de la violence à tous les niveaux - individuel, interpersonnel et collectif -, et plus particulièrement de la violence à l'égard des femmes et des enfants. Ces efforts doivent aussi porter sur le respect et le renforcement de la primauté du droit en tout lieu. Nous allons continuer à approfondir notre conception de la justice «restauratrice» ou «transformatrice», avec pour objectif l'établissement de relations justes et viables dans les communautés.
Pour renoncer à toute justification théologique et éthique de la violence, il faut faire preuve d'un discernement qui tire sa force d'une spiritualité et d'une obéissance inspirées d'une nonviolence active. Nous nous sommes engagés à entreprendre ensemble une réflexion éthique et théologique approfondie et à préconiser la prévention non violente des conflits, la gestion des conflits par les civils et le renforcement de la paix. La pratique de la non-violence doit être ancrée dans une spiritualité qui reconnaît que nous sommes vulnérables, qui encourage les sans-pouvoir à faire face à ceux qui abusent de leur pouvoir, qui croit à la présence active de la puissance divine dans les conflits humains et peut donc dépasser l'absence apparente de solutions pacifiques dans des situations de violence.
Au cours de la seconde moitié de la Décennie, nous voulons redoubler d'efforts pour conclure des alliances plus efficaces et forger des liens plus étroits entre les Eglises, les réseaux et les mouvements. Nous voulons soutenir et coordonner des projets communs qui visent à édifier des structures et mettre en place des instruments et des communautés vouées à la gestion civile et non violente des conflits. L'«espace oecuménique» offert par la Décennie doit être structuré par des rencontres, notamment au niveau des organisations gouvernementales et non gouvernementales.
Notre objectif demeure la quête de la réconciliation et de la paix, «de la périphérie au centre de la vie et du témoignage de l'Eglise». Edifier la paix de manière non violente est une vertu chrétienne fondamentale et un impératif du message évangélique. Nous sommes déterminés à devenir ce que nous sommes appelés à être: des ambassadeurs de réconciliation (2 Co 5). Telle est notre mission de guérison, qui comporte aussi bien l'accompagnement responsable de ceux qui sont sans voix que l'obligation de dire la vérité à ceux qui sont au pouvoir. Nous rejetons toute tentative de faire de la violence et de la crainte des instruments de la politique.
La communauté des Eglises affirme sa conviction que la communion de tous les saints, qui est un don de Dieu et a ses racines dans la vie trinitaire de Dieu, est capable de surmonter la culture de l'hostilité et de l'exclusion qui ne peut que déboucher sur le cercle vicieux de la violence. Cette communauté est devenue l'image de la possibilité de vivre ensemble dans la réconciliation, tout en reconnaissant que les diversités subsistent. Si cette communauté se fait l'avocate de la réconciliation de tous ceux qui, où que ce soit, sont victimes de la violence et propose des manières non violentes de résoudre les conflits, nous serons vraiment des témoins crédibles de l'espérance qui est en nous, en édifiant une culture de paix et de réconciliation pour toute la création.
Il n'est pas nécessaire de dire que l'amour bienveillant du Christ est empreint de paix. C'est pourquoi nous devons mettre fin aux querelles, tant en nous-mêmes qu'avec les autres ou encore avec les anges et travailler, de concert avec les anges, à faire la volonté de Dieu, conformément au dessein providentiel de Jésus qui accomplit toutes choses en tous, nous donne la paix ineffable et voulue de toute éternité et nous réconcilie avec lui et, par lui, avec le Père. Sur la base du témoignage des Ecritures, tout a été dit au sujet de ces dons surnaturels.
Denys l'Aréopagite
Nous prions : Dieu, dans ta grâce, transforme-nous, transforme le monde.